Début octobre, l’OSAV a publié son rapport 2022 sur les résidus de pesticides dans les denrées alimentaires d'origine suisse non BIO. Au total, 409 échantillons de fruits, légumes, céréales et huiles ont été analysés et les chiffres ne sont pas bons ! Plus de la moitié des prélèvements étaient contaminés par des résidus souvent multiples de 63 pesticides différents. Pire, presque 1 échantillon sur 5 était contaminé par des substances particulièrement néfastes pour la santé ou l’environnement et 1 sur 10 par des substances interdites ou non autorisées à l’usage. Enfin 2 des 3 pesticides les plus fréquemment détectés étaient des polluants éternels.
Début octobre, l’Office fédéral de la sécurité alimentaire (OSAV) a publié son rapport 2022 de monitorage des résidus de produits phytosanitaires (pesticides) dans les denrées alimentaires produites en Suisse de manière conventionnelle (non BIO).
L’objectif est d’obtenir des données représentatives afin de déterminer le niveau d’exposition de la population aux pesticides au travers de son alimentation et de déterminer les risques pour la santé des consommateurs.
Ce programme de monitorage a débuté en 2020 et devrait s’étendre jusqu’en 2024.
Au total, 409 échantillons de fruits, légumes, céréales et huiles ont été analysés sur la présence de résidus de pesticides et les chiffres ne sont pas bons. Dans 225 d’entre eux, soit plus de la moitié des prélèvements (55%), un ou plusieurs résidus de 63 pesticides différents ont été détectés. Plus grave, presque 20% des échantillons étaient contaminés par des substances avec un potentiel de risque particulier, c'est à dire ayant des propriétés particulièrement indésirables pour la santé humaine et pour l’environnement et 12% par des substances interdites ou non autorisées à l’usage dans notre pays. Enfin 2 des 3 pesticides les plus fréquemment détectés appartenaient à la famille des PFAS ou polluants éternels.
Les résultats obtenus lors des échantillonnages et analyses montrent la présence de résidus de pesticides le plus souvent multiples dans :
Cette substance est suspectée de provoquer le cancer par les agences réglementaires européennes.
Cette substance fait partie de la famille très controversée des fongicides SDHI qui inhibent la respiration cellulaire non seulement des champignons pathogènes mais, comme cela a été mis en évidence par étude récente, de quasiment tous les organismes vivants y compris les êtres humains car l’enzyme visée, est UNIVERSELLE. D'ailleurs une tribune publiée dans le journal le Monde et signée par 450 scientifiques a appelé à l’arrêt de l’utilisation en milieu ouvert de ces substances pour éviter une catastrophe sanitaire. Selon les chercheurs, des anomalies de fonctionnement de la SDH peuvent être à l’origine, ou contribuer à de multiples affections humaines, y compris aux principales maladies neurodégénératives comme la maladie d'Alzheimer ou le Parkinson et à certains cancers.
Récemment, les autorités nationales de plusieurs pays européens dont l'Allemagne ont classé cette substance dans la catégorie des polluants éternels, ou PFAS.
Récemment, les autorités nationales de plusieurs pays européens dont l'Allemagne ont classé cette substance dans la catégorie des polluants éternels, ou PFAS.
L'Agence canadienne pour la régulation de la lutte antiparasitaire (ARLA) considère que cette substance est un perturbateur endocrinien potentiel soit une substance capable d’interférer avec le système hormonal même à des doses infimes et suspecte des effets sur la reproduction. Les agences réglementaires européennes ont classé cette substance comme reprotoxique de catégorie 2, soit susceptible de nuire au fœtus. En 2014, L'EFSA a publié un avis scientifique sur le potentiel de neurotoxicité développementale de l'acétamipride (affection du développement du cerveau et de son fonctionnement). Cette donnée est particulièrement alarmante sachant qu’une étude très récente a révélé la présence de ce pesticide dans le liquide céphalorachidien, liquide dans lequel baigne le cerveau, de presque tous les enfants testés, laissant penser à une contamination chronique de la population.
l'Anses (agence nationale française de sécurité sanitaire de l’alimentation) note, en 2021, l'existence de données expérimentales pouvant suggérer un caractère perturbateur endocrinien. Les agences réglementaires européennes reconnaissent une suspicion de reprotoxicité et ont classé cette substance comme susceptible de nuire à la fertilité ou au fœtus.
Sur les 63 pesticides différents détectés, 15 étaient tout simplement interdits ou non autorisés à l’usage comme par exemple du glyphosate sur des pommes ! Cela représente sur l’ensemble des échantillons, plus d'une contamination sur 10. Comment expliquer cette situation? L’OSAV donne quelques pistes comme une contamination due à des résidus dans l’équipement d’application ou provenant de l’utilisation d’insecticides pour le nettoyage des silos de stockage des céréales.
Cependant dans un certains nombres de cas, l’utilisation non autorisée de ces substances actives par manque de formation, voir de malversation ne peut être exclue. Il est donc tout à fait légitime de se demander si cette pratique est généralisée et si les contrôles dans les exploitations sont suffisantes.
Les alkyls perfluorés et polyfluorés (PFAS) sont un groupe de plusieurs milliers de substances chimiques d’origine humaine, largement utilisées depuis les années 50 et extrêmement persistantes dans notre environnement (sols, eaux souterraines et de surface, etc.) et le corps humain d’où leur nom de «produits chimiques éternels». Des études montrent que les PFAS peuvent entraîner des problèmes de santé tels que des lésions du foie, des maladies thyroïdiennes, de l’obésité, des problèmes de fertilité et des cancers. Récemment, les autorités nationales de plusieurs pays européens dont l'Allemagne ont spécifiquement examiné quels pesticides relevaient de la définition des PFAS et ont dressé une liste: 20 pesticides actuellement autorisés en Suisse y figurent dont 2 des 3 les plus fréquemment détectés dans les denrées alimentaires analysés!
La présence de ces substances dans des aliments aussi communs que des pommes ou des fraises est très problématique sachant qu'elles peuvent en partie s’accumuler dans l’organisme.
La dose journalière admissible (DJA) est la quantité de pesticide qu'un individu pourrait ingérer chaque jour de sa vie sans risque pour sa santé. Sa valeur est calculée empiriquement à partir des études toxicologiques réglementaires fournies par les fabricants. Afin d'éviter qu'un consommateur moyen n'ingère une quantité de pesticide supérieure à la DJA, les autorités sanitaires ont définis des limites maximales de résidus (LMR) autorisées dans les aliments.
Alors, tout est sous contrôle? Clairement non ! Car aujourd'hui, non seulement la DJA est largement remise en question par les scientifiques, des études ayant montré que dans le cas des perturbateurs endocriniens, ce n'est pas la dose qui fait le poison, mais la répétition des expositions dans le temps, l'exposition à une multitude de pesticides (effet cocktail) ainsi que le stade du développement (fœtus, jeune, adulte) mais en plus, les LMR et la DJA sont totalement dépendantes de la bonne appréciation initiale de la toxicité des pesticides. Si celle-ci est mal évaluée alors ces valeurs limites réglementaires le sont aussi et le château de cartes s’écroule.
Le cas du chlorpyrifos est exemplaire. Durant presque un demi-siècle, les LMR de cet insecticide ont été considérées comme sûres pour la population. Ce n’est que très récemment que ce pesticide a finalement été retiré du marché suite à la publication de dizaines d’études scientifiques indépendantes accablantes. Neurotoxique et perturbateur endocrinien, cette substance a interféré sur le développement cérébral de millions d’enfants en Europe et dans le monde et est associée à des déficits de QI allant jusqu’à sept points pour les enfants plus exposés, à un retard de développement mental, des troubles de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité.
En ce qui concerne l’effet cocktail, c'est-à-dire l'effet que peut avoir un mélange de différentes substances sur la santé, les autorités sanitaires affirment à ce jour qu’il n’y aucune indication d’un risque sanitaire particulier considérant que la toxicité de chaque composant du mélange a été correctement évaluée (pas toujours justement !) mais précise tout de même que le sujet est très complexe et que l’EFSA publiera des résultats plus étayés autour de 2030 seulement.
En d’autres mots, tout est sous contrôle sauf qu'on ne l'a pas vraiment vérifié...
C’est d’autant plus alarmant que cette position est d'ores et déjà contredite par une étude réalisée par l’Inrae (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement) sur des rats exposés par l’alimentation à un cocktail de 6 pesticides différents (utilisés pour traiter les pommes), à des doses équivalentes aux DJA sur 1 an et qui montrent que le mélange de pesticides induit des troubles du métabolisme significatifs chez tous les animaux mais différents selon leur sexe. Les mâles présentent un diabète, une accumulation de graisses dans le foie, et un surpoids significatif. Les femelles montrent des perturbations hépatiques et une modification de l’activité de la flore intestinale.
Le programme de monitorage de l’OSAV s’inscrit dans le cadre du « Plan d'action pour la réduction des risques et l'utilisation durable des produits phytosanitaires » adopté par le conseil fédéral en 2017 et visant à réduire par 2 ces risques. Ce plan définit 8 objectifs principaux dont la protection des consommateurs et fixe 50 mesures pour les réaliser. A ce jour 49 d’entre elles ont été introduites.
La comparaison des niveaux de contamination des aliments produits sur notre territoire par des résidus de pesticides depuis le lancement du programme en 2020 ne montre malheureusement aucune évolution significative de l’exposition de la population à ces substances toxiques: 54% des échantillons présentent des résidus en 2020, 53% en 2021 et 55% en 2022 malgré toutes les mesures déjà mises en œuvre. Il n’est donc pas possible, à ce jour, de conclure à une réduction des risques pour l’être humain via l’exposition par son alimentation.
Pour terminer, nous tenions à vous faire part de notre très grand étonnement de n’avoir vu aucun des principaux médias nationaux reprendre les résultats de ce nouveau rapport. Pourquoi l’OSAV, dont la mission principale est de promouvoir activement la santé de l’homme et de l’animal, n’a pas jugé nécessaire d’informer la presse et par conséquent la population de l’existence de ce nouveau rapport par l’intermédiaire d’un communiqué?
Les citoyens de notre pays sont en droit d’être informés de la parution de tels données afin qu’ils puissent choisir d’adapter ou non leurs habitudes de consommation, de manière avisée et en toute connaissance de cause.